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Camillenchine, le blog d'une française à Pékin
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12 août 2006

Lost in restaurant

LostInRestaurantLe pitch : il y a quelques jours, ma propriétaire Zhennan (je ne vous la présente plus) est passée à la maison avec son paternel aux faux airs de Deng Xiaoping, pour réparer l'interrupteur de ma salle de bain qui était de nouveau cassé. La dernière fois je ne pouvais pas allumer, cette fois-ci je ne pouvais plus éteindre. Ce soir-là, elle m'annonce qu'elle voudrait m'inviter à dîner la semaine suivante.

"Super!" je réponds, sentant déjà monter en moi les prémices de l'angoisse.
Dîner chinois en famille = ne pas se planter dans le cadeau + ne pas faire de bourdes culturelles + lui glisser que cette fois-ci, trois mois de loyer d'un coup d'avance ça va pas être possible + faire comme si je trouvais son fils très bien élevé + ne pas planter les baguettes dans le riz + qu'est-ce-que j'vais mettre + comment refuser de goûter les pattes de poulet sans vexer personne + dîner à l'heure à laquelle je finis habituellement de déjeuner + ... = aaaaaaaaaaaah

Un brin paniquée, j'ai appelé Estelle la veille pour lui demander conseil.
"Estelle, qu'est-ce-qu'on offre à des chinois qui t'invitent à tuer le cochon en famille?"

Après lui avoir donné tous les détails que je connais sur la classe sociale des mes hôtes (csp++), Estelle conclut qu'un panier de fruits et/ou une bouteille de vin remporterai(en)t un franc succès.
Ce jour-là il y a beaucoup d'orage, et c'est un peu au dernier moment, entre deux averses tropicales, que j'enfourche mon vélo pour me rendre au Jenny Lou, en prenant bien soin d'oublier mon poncho k-way. Je sais d'avance que je n'y trouverai pas de panier de fruits, je me rabats donc sur une bonne bouteille et des bonbons pour le petit empereur de fiston. Evidemment quand je sors du magasin, des seaux d'eau s'abattent sur la ville. Dans le miroir en rentrant chez moi, je vois un chien mouillé qui a rendez-vous avec le parti trois quarts d'heures après. Nickel. La bouteille de vin est trempée, ce qui me permet de retirer facilement l'étiquette du prix*.
Un quart d'heure avant le rendez-vous donné, mon portable sonne, c'est elle, elle m'attend dans son 4x4 immaculé. Elle est toute seule, je me dis que le reste de la famille attend au restaurant. Pendant le trajet qui nous sépare du restaurant de huo guo (hot pot) où nous allons, elle me fait écouter la radio pour laquelle elle travaille. Comme sur sa carte de visite il est marqué program director, je lui demande si son travail consiste à sélectionner les programmes.

"Oh no, I am the manager!" ok, première bourde.

On parle de musique et je lui raconte ma rencontre fortuite avec Choucroute, ce qui a pour effet immédiat de la rendre extrêmement jalouse de moi. Apparemment Choucroute a un ascendant très fort sur les chinoises.

Elle me dit aussi qu'elle est contente d'avoir enfin du temps libre, depuis que ses parents sont en vacances chez elle et s'occupent de son fiston quelques jours, ce qui lui permet de sortir avec moi ce soir. Après avoir enregistré et analysé ces informations nouvelles, je comprends que nous ne dînerons que toutes les deux. Avant de sortir de la voiture, je lui tends mon cadeau ... en remerciant le ciel de m'avoir empêché d'acheter un panier de fruits de 8 kilos.

La prise de commande est un grand moment de solitude pour moi, car je ne comprends pas un mot de ce qu'elle me dit. Elle s'applique à me donner le nom des plats en anglais, ce qui n'est pas forcément une bonne idée car si elle a pas mal de vocabulaire, son accent est très mauvais.

"Tu as déjà mangé du pick green ?" me demande-t-elle en pétillant. Hum, mauvais signe, sûrement un truc que même Indiana Jones laisserait sur le côté de l'assiette.

"Du quoi ?", je demande, inquiète.

"Du pick green, c'est très spécial, ahah, mais c'est très bon!"

"Euh non jamais. Mais je veux bien essayer!" dis-je m'attendant à me voir servir un abat dont je ne soupçonnais même pas l'existence.

"Allez, à toi ! commande un truc !" me dit-elle.

"Ok, euh ... des légumes ?" persuadée que le reste de sa commande se situe entre les poumons et l'intestin grêle d'une pauvre bête en voie d'extinction.

"Tu bois quoi ? du Coca ou du Sprite ?"
Je réponds du Coca pensant que c'est ce qui rapproche le plus du cytrate de bétaïne.
Toujours intriguée par le pick green, je la relance sur cette partie obscure de notre menu, et après gestes et traduction en chinois, j'apprends qu'entre deux feuilles de chou, je vais faire cuire de la cervelle de porc dans la marmitte du huo guo. Pig brain. Nickel.

Tous les plats nous arrivent et le serveur nous apprend navré qu'il n'y a plus de pig brain en cuisine. Ooh, quel dommage. Mes intestins poussent un soupir de soulagement et nous attaquons un repas qui s'avèrera tout simplement délicieux. Mais comment aurais-je pu en douter ? Boeuf, champignons, algues, chou, et autres ingrédients non identifés mais très bons, plongent dans le huo guo pimenté et c'est un vrai festin.

Repas entre filles donc, durant lequel j'écouterai Zhennan me raconter que son mari ne vit pas à Pékin mais à Taiyuan, et qu'ils ne se voient que trois jours toutes les deux semaines. Que le soir où elle est passée chez moi avec son père, elle avait laissé son fiston dans le 4x4 avec la grand-mère car elle craignait qu'il ne soit trop bruyant. Qu'elle n'aime pas les japonais, mais que sa voiture est japonaise. Que oui, vous avec les allemands ça va beaucoup mieux, mais nous avec les japonais c'est pas pareil, ils se sont jamais excusé. Qu'elle rêverait d'aller en France mais que maintenant elle n'a pas le temps, et pourtant elle a l'argent. Qu'avant elle avait du temps mais pas d'argent. Que la semaine prochaine elle part quatre jours à Hong Kong avec son fils, une copine et ses enfants, pour s'amuser à Disneyland et faire du shopping. Qu'elle n'aime pas la cuisine occidentale. Elle aime la cuisine chinoise, épicée. Et puis et puis ...

Finalement je n'étais pas si lost in restaurant que ça. J'étais une sacrée chanceuse d'avoir passé cette excellente soirée. Et vous savez quoi ? Elle veut remettre le couvert. Deux autres restos prévus. Un restaurant de raviolis, et un autre de canard laqué. Trop top.

Petite chanson rigolote que je dédicace à Zhennan:

* I'm a Susan. Pour ceux qui ne connaissent pas Desperate Housewives, ben ... dommage!

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Commentaires
C
eheh, c'est normal, t'es Susan ;))<br /> <br /> moi je crois que c'est celle qu'on préfère parce que c'est la plus plausible (et la plus attachante comme dit Nemo)
D
je suis susan aussi :) (oui je sais, je débarque !)
C
oui c'est ce qu'elle n'arrêtait pas de me répéter, que c'est un plat d'hiver ... c'est sûr, entre les piments et la chaleur du plat, ça vous réchausse une banquise !
M
De la cervelle de cochon en hotpot, ca a ete mon premier repas lorsque je suis venu en chine la premiere fois. Ca marque une vie ;) Je n'ai jamais retente l'experience. Par contre, j'adore le hotpot EN HIVERS, c'est un plat d'HIVERS pour moi.
C
bienvenue sur mon blog Opio !
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